Suivez-nous
Cliquez ici pour configurer vos réseaux sociaux

Rencontre impromptue avec un pompier

Retour sur intervention

Quand tu te promènes avec l'Homme qui partage ta couche et ta fille, et que tu croises l'un des pompiers qui a contribué à te sauver la vie début juin. 

  • Lui "ah mais c'est bien vous, je vous ai vu au parc tout à l'heure, je me suis dis c'est elle mais j'étais pas sur. C'est quand j'ai vu votre mari là de suite, je me suis dis c'est donc bien elle"
  • L'Homme qui partage ma couche "C'est un des pompiers qui étaient là pour toi l'autre jour."
  • Moi "ah ben merci, je m'excuse de vous avoir pourri la tronche (même si j'ai des circonstances atténuantes). J'ai même pas de chocolat à vous donner en remerciement."
    Aucun souvenir de son visage évidement, la première crise d'épilepsie était toute proche. 
  • Lui "ah ben je suis content de vous voir comme ça, et pas besoin de chocolats c'est gentil à vous." 
  • Moi "J'en ai emmené aux urgences et au service de réanimation, c'est pour ça que j'y pense là"

Cette rencontre m'a rudement émue. La vie est rudement belle.

Une fois rentrée m'est revenue un échange de vie coopérative du Tiers-lieu "le 97". Ce jour là deux coopérateurs par ailleurs pompiers volontaires ont parlé de leurs ressentis en interventions et après, des modalités d'organisation d'un équipage de pompiers, d'une caserne. J'ai trouvé ce temps passionnant, empreint d'un échange profond sur son propre rapport à la vie et à la mort, pour chacun des dix coopérateurs présents autour de la table. 
L'un des deux pompiers volontaires a signifié comment lui, parfois, il se sent frustré de ne pas avoir de retour sur le devenir des êtres humains qu'ils a conduit à l'hôpital. Malgré le protocole de garantie du secret médical, qu'il respecte et comprend, il a juste parlé de son ressenti, de ce que ça lui fait de transporter des personnes dont il ne sait et ne saura jamais s'ils seront encore en vie suite à ce transport. Ici l'important n'est pas de mettre un protocole qui tenterai de soulager sa frustration, non. L'important c'est que le Sujet lui même puisse parler de sa frustration et de ce que ça lui fait de pas savoir. Un autre Sujet pompier n'aurait peut être pas le même ressenti, d'ailleurs rien qu'à la table de cette vie coopérative, un autre pompier témoignait de comment, lui, il préférait ne jamais savoir. 

Le hasard aura fait que ce pompier, mon pompier du jour, lui, il a eu le retour, "je suis en vie et je marche"

Parler de soi ça engage, c'est pas simple et pourtant quand ça devient possible ça engendre en effets secondaires pleins de choses en vie de veille: de l'apaisement, la possibilité de continuer son travail dans des situations où le Sujet (pompier, travailleur social, médecin, infirmier...) est brassé par ce qu'il ressent. 

Au Tiers-lieu, ce jour de vie coopérative, l'un des coopérateurs a pris l'animation du jour et à dit: "je propose un billet d'humeur, ça fait longtemps qu'on en a pas fait et ça me manque" Pendant ce tour de table, chacun a redis comment ce temps de parler de soi était au départ surprenant, comment à eux aussi il avait manqué et ils ont parlés d'eux. 

C'est le dialogue permanent entre individuel et collectif qui permet ainsi à chaque Sujet d'être dans son espace intérieur et dans son espace extérieur avec d'autres êtres humains.

Christine Jeudy | Psychanalyste


Méthodologie du Psychanalyste
Du point de vu de l'analysant