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Le Château ambulant (1)

De la machine à faire des représentations à la naissance du Sujet


La rencontre entre les sexes

Dans ce film d’animation réalisé par Hayao Miyazaki en 2004, Sophie vient d’avoir 18 ans, elle est jeune et jolie comme un cœur. Le réalisateur nous la présente dans la chapellerie de son défunt père, en train de planter consciencieusement une aiguille dans du tissu pour réaliser ses chapeaux.

Pour moi, elle fait pénétrer un objet dans une surface de tissu et elle créé un trou avec son aiguille. Comme une inversion, cette image me fait penser à ma castration en ce sens ou l’aiguille me rappelle mon zizi, qui en partant laisse un trou dans la surface de mon corps. Sophie me donne l’impression de rabouter un zizi là où il n’y en a plus : les deux pives de pin renforce mon association, elles ont l’air de deux couilles qui pendent sous un zizi formé de petite boule rouge. Comme nous l’apprendrons plus tard dans lors d’un échange entre Sophie et sa petite sœur Lettie, il se trouve que Sophie travaille dans l’atelier de son défunt père. Le lieu de l’action me laisse imaginer qu’il s’agit d’une métaphore d’acte sexuel entre la fille et le père. Lettie est soucieuse de savoir sa sœur rester dans ce magasin. Elle lui demande si elle va rester toute sa vie dans la boutique de chapeau. Sophie explique qu’elle est la fille aînée et que leur père y a consacré toute sa vie… Lettie lui répond « mais c’est pas ma question, est ce que toi tu as envie d’être modiste ? » Sophie ne répondra pas. Elle ne répond pas parce qu’il s’agit justement de son désir pour son père qu’elle prolonge via la confection de chapeau, mais ça ça se dit pas comme ça parce que c’est interdit. La situation semble figée pour elle, comme enlisé dans le désir de son père : l’atelier de chapellerie.

Sophie voit par la fenêtre le château d’Hauru. Les autres filles qui partent au défilé s’étonnent parce qu’il a disparu d’un coup sous leurs yeux, pour ne pas être vu par les avions de chasse qui le cherchent.

Il est là, puis il n’est plus là comme un zizi « il s’est envolé, il a disparu derrière les nuages pour ne pas être vu par les avions de chasses » Les filles semblent porter un profond dégoût pour ce Hauru : il vole le cœur des jolies filles et le dévore. Comment ne pas voir ici une différence majeur entre les sexes :

  • le fait que pour les garçons prime la recherche de jolies filles pour se prouver qu’ils ont encore bien un zizi.
  • le fait que les filles donne tout leur amour et se fond manger le cœur par des hommes qui court sans cesse après de jolies filles.

Le château ambulant m’a fait penser à une machine à faire des représentations pourvue d’une bouche métallique et d’une langue. Je m’explique, la manière dont il bouge, très mécanique, les fumées qui sortent par des trous, des tuyauteries de partout, ça m’a fait penser à nombre de mes rêves mais aussi à nombres d’inventions réalisées par des personnes dites psychotiques, comme un corps fait de brique et de broque.

Je pense notamment à K. il fabriquait une tonne d’objet avec des tuyaux, des bouteilles en plastiques, du métal. Il avait toujours l’ensemble de ses créations avec lui, un vrai château ambulant. Sophie est un personnage fictif, je vais donc me permettre d’interpréter le récit de son histoire, interprétation passé à la sauce de mon propre château ambulant bien sur. La machine a faire des représentations c’est le Sujet en tant que tel, et en tant qu’il produit ses représentations de lui, du monde.

J’ai repéré dans mes rêves, surtout en début de mon analyse, des engins de chantiers, des grues, des usines, des choses qui construisent d’autres choses. J’ai compris qu’il s’agissait de moi en tant que je me construis des représentations de moi lorsque dans l’analyse d’un rêve m’est venu la chose suivante :

  • l’engin de chantier qui pousse la masse de terre, qui pousse l’eau et produit ces trois vagues dans le lit du fleuve, qui me poussent à sortir du lit du fleuve et bien c’est moi qui l’anime dans mon rêve
  • je sors du lit du fleuve comme du ventre de ma mère
  • l’engin de chantier c’est moi qui me fait sortir du ventre de ma mère

Mon rêve produit une représentation de moi en tant que machine à faire des représentation. A défaut de parvenir à faire des représentations d’autre chose, mon rêve vient fabriquer une représentation de ce qui fabrique de la représentation : moi. La suite du film m’a convaincu que j’était sur la bonne piste mais j’y reviendrai.

Revenons à Sophie, elle part à l’opposé de la fête et du défilé.


Elle prend des chemins de traverses sombres en tenant un papier, une adresse. Un soldat l’interpelle « Elle cherche son chemin la petite souris ? » elle « je sais ou je vais » C’est là qu’Hauru arrive, se présentant comme le chevalier servant de Sophie.

Hauru est magnifique, d’une beauté incroyable. Il force les soldats mal intentionnés à partir au pas.


Puis les formes noires qui prennent en chasse Hauru et Sophie me fond penser à ma peur du noir (ou bien encore à la peur du noir que décrit ma fille aujourd’hui), et à la menace des sorcières la nuit dans mon lit de petite fille. Hauru se dit « Navré de l’entraîner dans une histoire qui ne la concerne pas » Tiens donc ? vraiment ? je ne pense pas, mais continuons.

Pour échapper à la menace voila Hauru et Sophie en train de s’envoyer en l’air.

Quelques mètres plus bas elle parle de lui à sa sœur, comme si elle était tombé… amoureuse. Sa sœur Lettie de lui dire « mais il t’a volé ton cœur ? tu as de la chance que ça soit pas Hauru parce que sinon il te l’aurais dévoré » Sophie de répondre « ça ne peut pas être lui parce qu’il ne s’intéresse qu’à la beauté » Comme je me reconnais dans les propos de Sophie, tellement persuadée qu’il lui manque quelques choses : la beauté. J’y vois ici comment la beauté vient en écran à la castration, la fille est intéressante pour le beau jeune homme uniquement si elle est belle. Oui parce que comme l’on dit les filles un peu plus haut, Hauru n’a pas de cœur, d’ailleurs il vole celui des filles et les mange. Il s’intéresse uniquement à la beauté, autrement dit il cherche à se prouver qu’il a ce qu’il faut là où il faut.

De la sanction à la mise en mouvement

A son retour, une femme s’introduit dans l’atelier de Sophie, celle ci avait pourtant fermée la porte à clé.


Sophie tente de mettre dehors la désagréable femme en la priant de sortir, à cet instant elle découvre qu’il s’agit de la sorcière des Landes. Celle ci utilise le prétexte que Sophie l’ai défié pour la faire vieillir : autrement dit lui enlever sa beauté. Mais en réalité la sorcière semble avoir pris sa beauté parce qu’elle a attiré l’attention Hauru « tu passeras mes amitiés à Hauru » Je reconnais ici ma propension à m’intéresser plus à celle qui a les faveurs d’un homme que je convoite plutôt que l’homme en question. La mécanique est la suivante, je cherche à avoir ce que l’autre a : la beauté nécessaire pour attirer l’homme. Dans mes rêves j’ai pu trouver des morceaux de moi qui voudrais bien anéantir cette autre si belle. La première a m’avoir fait cette effet fut ma mère, oui elle avait mon père alors que moi pas. Je peux aussi dire les choses autrement, Sophie a été punie par la sorcière parce que Hauru lui a porté de l’attention. Je vous ai parlé plus haut de mes sorcières. Petite j’avais très peur que la nuit des sorcières viennent et ne me coupent ce qui dépasse de mon lit : bras, jambe… Alors je prenais un grand soin à border mon lit et je prenais mon doudou contre mon cœur en me répétant que mon lit était magique et que personne ne pourrait y pénétrer. La sorcière pour moins c’était ma mère qui venait me punir d’avoir désirée un homme qu’il ne fallait pas désiré parce que mon père mais aussi parce qu’elle même le désirait. L’expression n’est pas la même entre le film et moi, et pourtant une structure se dégage : un désir pour un homme, de l’attention de l’homme portée sur la fille, une pénétration dans le magasin malgré la fermeture de la porte à clé et la sanction : Sophie perd sa beauté et sa jeunesse. Le fait de prendre sa jeunesse à Sophie est pour moi de l’ordre de la castration, d’autant que le sort l’empêche également de ne jamais dire qu’elle a subit un sort, elle a la parole coupée à cet endroit.

Alors le lendemain, Sophie se cache pour ne pas être vu des autres, et notamment de sa mère. Sophie prend la route pour trouver le château ambulant, elle se mets en route pour tenter de trouver une solution à son malheur, à son symptôme. Elle se lance dans une quête de sens qui ressemble pour le peu grandement à une analyse. Je ne sais pas vous, mais moi, dans mes rêves j’ai rêvé de nombreuse fois de ces chemins de montagne, que je prenais pour arriver dans une maison soit accueillante soit terrifiante. C’est en parcourant les chemins de mes rêves que je les croise au fil de mes nuits.

La route vers l’intérieur du Château Ambulant

Malgré le handicap de son âge Sophie marche longtemps, longtemps pour trouver le château ambulant de ce fameux Hauru à qui la sorcière des landes lui a dit de passer le bonjour.En effet, à ce stade du film, Sophie ignore encore qui est ce magicien. En chemin elle trouve un bâton et elle cherche à le prendre pour s’en faire une canne, oui un truc en plus pour tenir debout quoi. Imaginez mon sourire quand j’ai vu ce plan:

Et mon rire lorsque j’ai vu le plan suivant : un épouvantail qui bouge.

Sophie rencontre ainsi son nouvel ami qu’elle prénommera Navet en hommage à sa tête en forme de navet et malgré le fait qu’elle n’aime pas les navets. Ceci n’est pas un détail nous y reviendrons. Pour l’heure elle essaye de s’en débarrasser, en vain, Navet la suit partout. Elle se détendra et acceptera la compagnie de son nouvel ami lorsque celui ci lui donne une canne, juste à la taille de la vielle femme. Alors elle lui demande s’il a une idée pour qu’elle passe la nuit au chaud et il lui ramène le château ambulant.

La voila qui s’aventure à regarder à l’intérieur de ce château ambulant.

Ce passage me fait penser à un scène primitive, comme si à défaut de pouvoir se représenter une image d’elle même, Sophie entre ouvre la porte de ce château comme elle aurait pu entre ouvrir la porte de la chambre de ses parents et ainsi regarder le moment de sa conception à défaut de pouvoir se voir elle même. Je retrouve dans de nombreux de mes rêves l’image d’une fente, d’un trou de serrure par lequel je tente de regarder ce qui se passe de l’autre côté. Je sais que c’est interdit mais j’y prend un grand plaisir : mon désir tend à aller au delà de cette porte même si le risque me parait grand : la castration. Sophie décide d’y rentrer en se disant que bien que Hauru soit cruel, il ne dévorerait pas le cœur d’une vielle dame, sous entendu la beauté et la force l’on quitté, elle n’est donc plus suffisamment désirable pour un homme, elle ne risque donc pas de se faire dévorer le cœur. L’intérieur du château est en ruine, plein de poussière et de toile d’araignée. Ces images ne sont pas sans me rappeler les pièces que je croise parfois dans mes rêves, ces autres pièces dégueulasses qui sont autant de représentations de désir peut avouable parce que interdits. Alors je n’ai pas été très étonné de trouver dans le château un démon du feu à l’accueil : Calcifère. Le feu me fait penser au feu de la passion, à la libido quoi. En effet, c’est grâce à lui que le château déambule, c’est lui qui donne le mouvement à ce que je vois moi comme une machine à faire des représentations. Autrement dit c’est le sentiment qui pousse un être humain à se mettre en mouvement.



Pour continuer à lire mon article cliquez sur: Le château ambulant (2) et Le château ambulant (3)

Christine Dornier | Psychanalyste

Désir d'être celle que je ne suis pas
ou comment mon désir me conduit à désirer prendre la place d'une autre