Le rêve
Je suis dans un village il fait nuit. J’ai donné le siège conducteur de ma Yaris à X et j’en ai récupéré un en échange. Je suis près de la ville de D. Je commence à chercher de quoi bricoler pour me remettre un siège conducteur. Le siège que j’ai récupéré en échange est un siège de chaise longue garnie de trous béants. J’avais pas vu l’affaire avant. Pour garnir un peu l’assise je retourne dehors, dans un recoin sombre, devant un garage j’avais repéré un carton tout à l’heure. Le carton est là mais plein d’eau: entre temps il a plu. Un homme passe. “Vous avez de la chance je rentrais chez moi. Je vais vous aider avant” Il trouve un siège de bureau, démonte l’assise, la visse dans la Yaris. Pour parfaire le côté bien rangé il installe un drap de bain dessus. Je suis inquiète, il manque les accroches pour les ceintures. Lui de me dire “on s’en fou”. Moi d’imaginer être obligée de retourner chez L et F où je sais qu’ils ont le siège que je n’ai plus.
L’analyse
Le village de nuit est une représentation de mes voyages oniriques. Chaque nuit j’effectue une balade nocturne dans mon inconscient pour y visiter l’ensemble de mes autres maisons, appartements, pièces: c’est à dire l’ensemble des pièces de mon inconscient.
Certains d’entre vous l’on peut être déjà lu, je possède effectivement en vie de veille une voiture de type Yaris. Cette voiture a des chevaux sous le capot. Dans mon rêve c’est une métaphore de mon phallus/ de mon zizi. A défaut d’en avoir un entre les cuisses, j’en ai sous les pieds. D’ailleurs peu importe: mes pieds entourent mon sexe, il s’agit d’une représentation de mon sexe au sens ses limites sont justes poussées au bout des jambes délimitant mon entre jambes. Les pieds c’est le bout de mes jambes, ce sont eux qui viennent délimiter les contours de mon sexe. Je fais l’hypothèse que pour ceux qui aiment follement les pieds, il s’agit d’un déplacement du trou en tant que tel vers le bord du trou. L’inverse est d’ailleurs une hypothèse qui cohabite avec celle dont je viens de vous parler pour ceux qui ont horreur des pieds. Comme à chaque fois, l’expression d’une structure que je repère comme récurrente chez les êtres humains s’exprime d’une manière éminement individuelle et subjective.
En
vie de veille j’ai toujours été la propriétaire de la voiture et j’ai
bien souvent laissé le volant aux mains de mon mec du moment. La place
conducteur est vue par mon inconscient comme la place du mec, de l’homme
que je désire: de mon père aux différents hommes que j’ai aimé.
Mais alors le siège conducteur? pourquoi l’ai-je donné, faut avouer que
c’est con de donner un siège conducteur quand même hein. Et bien ici ce
qui me vient c’est que ce siège est une représentation de mon ex. En
effet X, F et L sont des personnes qui fréquentent encore mon ex alors
que moi je n’ai plus ma place chez eux. Alors pour me récupérer sur
l’idée qu’à la fois mon ex m’a larguée et que mes potes l’ont gardé et
pas moi, je me mets en scène comme l’ayant donné. C’est moi qui en ai
décidé ainsi.
La structure raconte à la fois:
- la perte subie
- la mise en scène de me récupérer quelque chose que j’ai perdu ou de me mettre en scène faisant le choix de me démunir de quelque chose
ça me rappelle bigrement la structure de mon angoisse de castration s’t’affaire. Plusieurs rêves et analyse m’ont permis de comprendre comment j’ai associé le moment où mon ex me quitte, à cette angoisse de castration comme dans ce rêve.
Mon rêve me met en scène ayant trouvée un siège de remplacement. Dit autrement la chaise longue est la représentation d’un nouveau mec mais pas n’importe lequel: la chaise longue me fait penser à l’Homme qui partage aujourd’hui ma couche. En effet, l’image de la chaise longue je l’empreinte à ma vie de veille. Cette chaise mon galant/ mon chum se l’est acheté il y a près de 6 ans pour se faire son bureau à domicile.
Les trous que je lui attribue correspondent à la différence entre l’idée que je me fais de cet homme et la réalité de ce qu’il est en vie de veille. Tout comme le mot n’est pas la chose, l’idée que je me fais de lui ce n’est pas lui en tant que tel. Il manque toujours quelque chose à l’idée par rapport à ce qu’il est dans la réalité. De plus il a cette finesse de lire mes travaux et d’avoir compris que parfois me laisser dans l’idée vient titiller mon désir grave entre deux caresses et gros câlins. Écrire ces lignes vient me provoquer une foule de papillon dans le ventre.
Le
rêve en remet une couche sur mon galant. Le carton que j’avais repéré
devant l’entrée d’une porte de garage se trouve trempé. Ici il s’agit de
la mouille de plaisir qui se répand devant la porte de mon garage lors
que l’homme passe. Cet homme qui passe devant c’est encore lui, l’homme
qui partage ma couche. Il y a quelques mois il m’a aidé à monter ma
nouvelle chaise de bureau que mon rêve emprunte pour remettre de la
représentation d’un siège là où il n’y en a plus.
Ici
encore je retrouve la structure liée à l’idée de castration. La
castration c’est le moment ou l’enfant se rend compte qu’il y a ou pas
un zizi entre les cuisses de la moitié des êtres humains: qu’il y a une
différence. Cette différence l’enfant se l’explique par l’idée qu’il y
avait un zizi qui a été coupé.
Dis autrement, l’absence de zizi, pour de vrai est vu comme une absence
de représentation du zizi là ou il devrait y en avoir un. ça laisse un
rien, un trou. J’ai trouvé dans mes rêves des scènes ou je me dis qu’il y
a rien là ou il devrait y avoir quelque chose. J’ai des analysants qui
témoignent de moment de vie ou le cousin, le frère, le copain vient
regarder sous une jupe et dit “y a rien”
Dans le champ de la réalité: pour de vrai, il n’y a pas de zizi / phallus / verge et bourses, sur un sexe féminin.
Dans le champ de l’imaginaire:
- pour de faux, l’enfant attendait une représentation de zizi sur le sexe féminin: mais il n’y en a pas.
- La représentation est absente/ y a comme un trou / un rien là ou il devait y avoir un zizi.
- Ce qui vient tout de suite c’est " il a été coupé"
- La représentation que le sexe féminin c’est un rien/un trou/un zizi qui manque.
- L’absence de représentation du zizi amène une représentation du trou, c’est à dire de la castration/ c’est à dire de l’affect comme tel (parce que l’affect c’est le trou), c’est à dire de l’angoisse…
- l’angoisse c’est le trou en tant que il pourrait y avoir quelque chose.
L’absence de présence du zizi pour de vrai, amène une absence de représentation du zizi là ou l’enfant en attendait imaginairement une. Ceci amène de suite une représentation de la coupe du zizi / castration, qui amène à son tour une représentation du trou.
Le nouveau siège est encore vue comme insuffisant, il manque les accroches de ceintures. Nicolas, l’homme qui partage ma couche, aime me faire bisquer en n’accrochant pas sa ceinture sur des courts trajets. La voiture se met alors à biper dans un vacarme sans nom. La dernière fois où il a joué à ce jeu il a calé sa voix sur le bip pour dire “je t’aime, je t’aime, je t’aime…” J’ai ris de bon cœur et depuis le fameux bip ne vient plus m’agacer. Le rêve vient prendre cette image pour représenter le ça, cette partie de moi qui désir et qui franchit l’interdit de la ceinture dans le rêve. L’interdit mit en représentation dans ce rêve est moulé sur celui de l’interdit de l’inceste. Pour de vrai Nicolas n’est pas mon père donc notre relation est possible, et pourtant mon inconscient le voit comme un mec venu à la suite de mon père d’où la représentation de l’interdit que mon rêve me fait franchir.
Lorsque je me pense obligée de retourner chercher le premier siège chez ces amis qui ne le sont plus je suis prise d’une angoisse incroyable. Ma séparation d’avec cet ex date d’il y a plus de dix ans, pourquoi venir me remettre en scène ce traumatisme aujourd’hui? La semaine précédent ce rêve, j’étais allée voir sur le net ce que devenaient tous ces gens, un comportement dont je ne suis pas bien fière et pourtant que je porte donc bon je vous en parle. Il se trouve que ce rêve est venu conclure une semaine particulière, en effet il date de la nuit du 2 au 3 novembre et mon ex m’a quitté un 3 novembre, date à laquelle nous nous étions marié trois ans plus tôt. Je suis abasourdi de voir comment, avec les années, avec l’analyse, mon traumatisme de l’époque demeure: une rupture comme un écho à mon angoisse de castration. Cette analyse vient confirmer mon hypothèse que tout reste dans l’inconscient, ce qui est inscrit ne s’efface jamais.
Christine Dornier | Psychanalyste | Besançon