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Un coup d'avance

Mon histoire de la mort de mon père

Le rêve

je suis dans la campagne avec un garde-chasse. Il demande si mon père est disponible pour parler. On prend sa voiture pour rejoindre les gars. Le repas est agréable, le temps et beau. Le garde-forêt explique qu’une antenne de communication de l’armée a sont débit d’onde déroutée. Il veut en causer à mon père mais celui ci à une autre mission il part avant tout le monde. Reste que moi pour rediriger le flux. Je me propose. Mais le garde semble dubitatif, il m’a amené en voiture, s’il part tout seul faudra que quelqu'un me redescende. Il pense que je n’ ai pas les habits adaptés pour faire le taf. Moi je me dis qu il va falloir marcher, je suis pas super emballée. Je me retrouve ensuite dans la salle de bain de chez mes parents. Ma mère me donne les lunettes de mon père. Des lunettes jumelles qui permettent de mesurer le champ magnétique dégagée par une antenne. Par la fenêtre c’est le paysage de Besançon avec ses antennes sur les 7 Collines. J’en vois trois qui pointent vers le ciel. Blanche et rouge. Je vise la croix du viseur bien poser sur le antenne et j’appuie sur le bouton pour avoir le chiffre.

L’analyse

La campagne est le décors de mon enfance. J’y ai habité avec mes deux parents et je l’ai parcouru avec mon père en l’accompagnant à la chasse.
Le garde chasse ou foret (peut importe) vient en représentation de la loi, celle qui pose les choses que l’on n’a pas le droit de faire, l’interdit. Je me tape néanmoins le luxe de monter dans sa voiture, en somme je me tape le luxe d’avoir une relation sexuel avec lui. Ce garde c’est aussi une représentation de mon père en ce sens ou quand, petite, il me braillait dessus je mouftais pas, c’était lui la loi.
Mon rêve met en représentation la loi, la chose qui interdit l’inceste: le garde et en même temps le rêve met me mets en scène dans un rapport sexuel interdit avec mon père. La censure le transforme en garde, histoire de brouiller les pistes.
Les ondes déroutées qui posent problème au garde sont une représentation de sentiments, de libidos, de ce truc invisible qui pousse à aimer, à haïr, à pleurer, rire, à ressentir des émotions, à désirer.

Mais pourquoi des ondes déroutées et pourquoi l’armée? ce qui me vient a cet instant, c’est un échange que j’ai eu avec mon père le 18 septembre dans l’après midi. Il était allongé dans son lit, il m’a pris dans ces bras: “oh que c’est bon de te voir” m’a t’il dit, “viens là que je te prenne dans mes bras, je ne l’ai pas assez fait par le passé.” Il s’est mis à pleurer à chaude larme “oh je t’aime” a-t-il continué “je ne te l’ai pas assez dit. Je m’excuse, je t’ai trop crié dessus petite. Qu’est ce que tu veux on sait pas trop comment faire, on fait ce qu’on peut, mais je m’excuse, je braillais parce que j’avais peur pour toi. Mais j’aurai pas dû je suis désolé. Je t’aime et j’aurai pas voulu d’autre fille que toi. On s’est pas toujours compris les deux, mais sache que je suis fière et surtout va en paix” De vous l’écrire les larmes coulent à flots sur mes joues, tout comme quand j’étais dans ses bras. C’est venu ré-aiguillé un truc dans mon cœur, un truc d’apaisement: putain, il m’aime et il est fière. C’est comme si les ondes de mon rêve, déroutées entre deux antennes de l’armée ça venait me mettre un manque dans mon cœur, comme s’il y avait besoin que pour que le courant passe entre lui et moi, les ondes repassent. Comme si je m’étais interdit moi même qu’elles passent et ça me manquait.

L’armée de mon rêve s’est une de mes représentations de l’interdit. Interdit que les ondes passent entre l’antenne dressée au ciel de mon père et moi. L’interdit qu’en vie de veille quelque chose passe entre son antenne dressée et mon corps. L’armée c’est ce qui fait qu’un pays ne pénètre pas un autre pays, c’est ce qui garde les frontières.
Je savais qu’il gueulait parce qu’il avait peur, mais moi petite j’ai imprimé que ce que je faisais ne suffisait jamais. Bien sûr le fait que j’ai imprimé que je ne suffisais pas n’est pas seulement dû à ses gueulantes, c’est aussi du à ma jalousie sans nom que je porte à ma mère, jalousie d’avoir eu mon père alors que moi non. Je ne pouvais jamais suffire parce que c’est interdit dans la vrai vie de coucher avec mon père, ça c’était réservé à ma mère. Les gueulantes sont venues en surcouche de mon traumatisme initial: je ne peux pas avoir mon père. Dans mon rêve ça ressort sous les traits de mes habits pas adapté pour faire la mission que le garde voudrais faire prendre en charge à mon père. Sauf que j’ai tout collé dans mon inconscient, comme si l’idée était devenue la chose. Comme si ce que je ressens ou ressens l’autre était un passage à l’acte, comme si quand je pense l’autre pouvait entendre ma pensée: alors dans mon inconscient une armée entière s’est dressé pour m’interdire en plus de la vraie vie/vie de veille, m’interdire dans mon inconscient de désirer mon père, ça c’est ce qui peut être appelé le refoulement, on le déni peut importe.

Extrait de mon rêve: Mais le garde semble dubitatif, il m’a amené en voiture, s’il part tout seul faudra que quelqu'un me redescende. Il pense que je n’ ai pas les habits adaptés pour faire le taf. Ce jour là, toujours le 18 septembre, j’ai dis à mon père “j’ai toujours été persuadée que tu voulais un garçon et que tu m’aimais moins parce que j’étais une fille” Il a répondu “bien sur que non, ah si, sauf une fois, tu étais petite, ta mère était en stage, on était allé aux champignons. Tu as eu envie de pisser et là tu as pas tiré la culotte assez loin: là j’aurai voulu que tu sois un garçon” J’ai ris et pleuré à la fois. Non je n’étais pas folle, il aurait bien aimé un garçon et en même temps il m’a aimé infiniment. Mon rêve vient me resservir la chose en m’indiquant que pour faire un taf de mec faut les habit qui vont avec, et le zizi quoi. L’inconscient est comme ça, c’est pas une question de morale, et la femme n’est pas destinée à se croire inférieur, non, quand un mec à les couilles comme mon père de dire ce qu’il a au fond des tripes, ça fait repasser le courant, ça m’a permis à moi fille de rire et pleurer à la fois en comprenant que oui il aurait aimé un petit mec, et aussi, en même temps il m’a aimé en tant que fille (avec son lot d’interdit aussi parce que le désir inscestuel c’est pas que dans un sens)
Dans les jours qui ont suivis, il m’a dit que la nuit il refaisait sa vie à l’envers, qu’il refaisait ses souvenirs. Ce qui l’empêchait de dormir c’était d’imaginer qu’il allait me laisser seule, moi et ma mère, qu’il ne serait plus là pour nous protéger. En somme et pour mon inconscient, il m’a amené en voiture dans ce rêve, métaphore pour son zizi, dans la vie. Par contre il ne pourra pas me ramener, oui c’est comme ça, la vie c’est dans un sens, on revient pas en arrière ça nous est interdit. Et ce sens mène vers un nouveau trou, celui de la terre pour y ensevelir le corps: la mort quoi.

Dans mon rêve (j’avais écris dans mon père), mon père n’est pas là, comme s’il avait chaque fois un coup d’avance. Le 27 septembre, date de ce rêve, ça fait une dizaine de jour que j’ai le sentiments de jouer à un jeu dont je n’ai pas les règles, une partie d’échec menée par mon père. Une partie en métaphore du reste de sa vie. Et sur ce coup là il a eu toujours un coup d’avance, oui c’est sa vie, pas la mienne, comment aurai je pu savoir pour lui. Il a passé ses derniers jour à préparer administrativement, matériellement, humainement le fait qu’il allait mourir et in fine: le fait qu’il ne serait plus là. Dans mon rêve ça me donne un sentiment de là et pas là à la fois, comme si déjà dans mon rêve je tentais de mettre en représentation ce qui m’angoisse dans l’idée de sa mort, le renvoi à mon traumatisme initial d’avoir perdu/pas eu mon zizi. Alors pour me réconforter dans le rêve je le mets en représentation partie loin, en mission, dans un truc méga important, un truc de couillu quoi.

Mon rêve m’amène ensuite dans la salle de bain de chez mes parents. Il faut que je vous précise ici qu’avant les travaux (que mon père à fait), cette pièce, c’était ma chambre, ma chambre de petite fille, jusqu’à l’adolescence. Mon père n’est toujours pas là, mais ma mère me tend ses jumelles, le zizi de mon père en somme (oui j’ai toujours ce désir qu’elle me le cède, même si d’un autre coté ça me va bien que ça soit elle qui le gère)
Mais à travers ses jumelles, je vois le paysage de Besançon avec ses antennes sur les 7 Collines. J’en vois trois qui pointent vers le ciel. Blanche et rouge. Ces antennes dressées sont évidement des représentations de phallus que je désire, oui j’en mesure même la force du champs magnétique, de ce qui m’attire dans ce lieu qui est aujourd’hui chez moi. Ce qui m’attire? l’homme qui partage ma couche bien sur, mes enfants, la psychanalyse, les copains, mes analysants, le tiers lieu, la vie… Voila l’explication des ondes déroutées, oui mon désir s’est dérouté de mon père pour aller se porter sur d’autre chose que je désire. Et pourtant le désir pour mon père n’est pas mort, ça cohabite c’est tout.

Le 2 octobre, nous étions ma mère et moi, en train de retirer quelques patates dans le jardin quand l’infirmière nous a appelé. Arrivée à l’étage elle nous a dit “son état à changé d’un coup, il est en train de partir” J’avais les mains pleines de terre, je lui ai caressé la joue, ma mère a posé sa main sur son torse, deux respirations apaisées et il est mort. Un coup d’avance encore… j’ai pu voir le dernier souffle de mon père.

Christine Dornier | Psychanalyste

analyse de rêve du 27 septembre 2021

Sacrifice
Entre enjeu du corps et survie psychique du Sujet